dimanche 3 novembre 2019

0187 - Má Vlast


Sur ce blog, vous l'aurez compris, je parle peu de musique - qu'y a t'il à en dire de toute façon ? Je parle de disques pris en tant qu'objets, de collection et beaucoup de moi - pas sûr que dit ainsi, ça intéresse grand monde. La plupart des billets ont pour point de départ une anecdote, un souvenir ou un rapprochement d'idée avec quelque chose qui a parfois peu de rapport... d'autres fois, ça peut partir d'un seul mot. Il y a des mots que j'aime vraiment. Oui, on peut aimer des mots. Pour ce qu'ils représentent. Pour leur son. Pour leur orthographe bizzarre...
J'ai été longtemps étonné de ces interviews d'auteurs et d'écrivains où ceux-ci étaient capables de répondre sans réfléchir à la question de leur mot préféré. J'ai compris peu à peu. C'est même une question qui me paraît essentielle aussi, l'amour des mots pris dans leur individualité, sans phrase autour pour les dénaturer... Mes mots préférés ? Le verbe tintinnabuler et le mot Amok dont j'avais fait un poème absurde uniquement basé sur la sonorité qui n'a visiblement pas été compris - désolé, je m'égare parfois dans mes propres pensées.
Cette introduction est bien longue, non ? Surtout qu'il y en aura une deuxième pour réellement introduire le disque du jour... Tout ça pour dire : le point de départ du billet du jour fut un superbe mot : diacritique. Ce ne fut certes qu'un point de départ...

Parler de compositeurs tchèques est une bonne occasion d'utiliser les caractères spéciaux ornés de ces diacritiques étranges, inconnus du français, qui, très certainement éloignent largement la prononciation des mots tchèques de ce qu'un francophone peu doué en langues étrangères comme moi aurait envie de lire en les découvrant. On ne prononce probablement pas Bédriche Smetana, ni Ma Vlaste... quant à Z Českỳch Luhů a Hájů, peu importent les diacritiques, même en les supprimant, il me faudrait une piste ou au moins un indice pour que je me risque à le prononcer à voix haute... heureusement je suis ici à l'écrit...

Mes rudiments de Tchèque (c'te blague) cependant me permettent de savoir que Má Vlast signifie Mon Pays ou Ma Patrie et mon voyage à Prague, il y a près de quinze ans déjà, m'a appris que Vlatva est le nom du fleuve qui coule dans la capitale tchèque, fleuve plus connu en France sous son nom teuton de Moldau (prononcez approximativement moledaho - j'ai appris un peu d'Allemand dans le secondaire) ; n'oublions pas que Prague fut longtemps une ville germanophone, l'extraordinaire fou furieux écrivain de langue allemande Franz Kafka y vécut par exemple toute sa vie (le Musée qui lui est consacré à Prague était incroyable...).

Cet enregistrement de Má Vlast dirigé par Karel Ančerl (diacritique que je trouve particulièrement esthétique sur le c) je l'ai justement acheté en rentrant de ma semaine touristique à Prague - on ne fait pas plus cliché... ah si, j'aurais carrément pu l'acheter à Prague... pourquoi ne l'ai-je pas d'ailleurs fait ?
Avec ce cycle de poèmes symphoniques, Smetana nous propose un voyage à travers sa Bohême chérie, d'en restituer les ambiances, les paysages et d'en évoquer l'histoire, parfois légendaire... tout un programme. Les six morceaux sont évidemment dominés par VlatvaLa Moldau, que tout un chacun connaît et est capable de siffloter. Peut-être d'ailleurs est-ce parce que le thème de La Moldau est le plus facile à chantonner que les autres que c'est le morceau le plus célèbre du cycle... Les autres morceaux possèdent néanmoins eux aussi leurs qualités et la même alternance de moments calmes et de passages impétueux et ne méritent pas d'être ainsi négligés.

Dans sa composition, dans son style, dans son ambition, Má Vlast est à rapprocher de la Symphonie du Nouveau Monde de Dvořák (tiens donc... un autre Tchèque) pour (presque) le même résultat : facilité d'apprivoisement, ampleur quasi cinématographique mais aussi grandiloquence flirtant avec le pompier ou le kitsch. On retrouve d'ailleurs dans plusieurs éditions CD de la Symphonie du Nouveau Monde, pour compléter, à la fin, un enregistrement de La Moldau.... ce n'est pas un hasard.

L'éditeur (tchèque) Supraphon (sans diacritique, hélas) a mis pour ce disque les petits plats dans les grands. Gold Edition peut on lire sur la couverture. En quoi cela consiste ? En une pochette carton autour du boitier plastique... et à un CD non pas argenté sur sa face soumise au laser mais... doré. Quel luxe !

Pour finir, un (mauvais, il va de soi) jeu de mots : j'attends vos dia... critiques. 

Má Vlast
Bedřich Smetana / Karel Ančerl
Supraphon 1964 / 2002

01 - Vyšehrad
02 - Vlatva
03 - Šárka
04 - Z Českỳch Luhů a Hájů
05 - Tábor
06 - Blaník

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