Il y a des disques de ma collection que je n’écoute pas assez. Parce qu’ils m’intimident. Je n’ose pas m’y confronter. Et pourtant, quand je les pose sur la platine, c’est évident, c’est superbe. Dutilleux / Ohana par Marie-Josèphe Jude (piano) est de ceux-là. Je l’avais emprunté à la médiathèque de Versailles - peut-être pour Dutilleux (à la suite de la lecture d’un article sur son œuvre et sa postérité), peut-être parce que le disque appartient à la même collection que mon Shrakma, peut-être parce que Ohana (que je ne connaissais pas) se prénomme divinement, peut-être me fiant au hasard - et commandé quelques moisemaines plus tard.
Je ne sais ce qui m’impressionne le plus. Le nom de Marie-Josèphe Jude ? Ça en jette Marie-Josèphe, comme prénom. On n’en rencontre pas tous les jours. Ça évoque un certain milieu, pas celui où on peut mettre les coudes sur la table et lire du San Antonio aux toilettes. Pas un milieu où on se fend la gueule quoi. J’en ai de ses a priori… mais le prénom conjugué à de la musique contemporaine, musique à la réputation de sérieux, d’austérité et de rigidité, on se dit que l’heure du disque ne va pas être la plus joyeuse de la journée. Qu’on risque même quelques disharmonies bien calculées et des compositions aussi légères que le granit.
C’est tout le contraire. Les Études d’Interprétation d’Ohana sont certes un peu abruptes par moments, il faut se fier à l’interprète, s’abandonner pour qu’il nous guide à travers les couleurs. Marie-Josèphe fait ça très bien - on en sort ébloui. Quant à la Sonate de Dutilleux, tout sauf monolithique, elle est incroyablement liquide. Elle goutte, elle perle, elle glisse entre les doigts de Marie-Josèphe. C’est presque aussi beau que le Gaspard de Ravel.
Dutilleux / Ohana
M.J. Jude / H. Dutilleux / M. Ohana
Harmonia Mundi France 1995
01-03 - Sonate (H. Dutilleux)
04-09 - Six Études d’Interprétation (Douze Études d’Interprétation, Livre I) (M. Ohana)
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