J’écoute Crescent. Pendant que j’écris ce billet à propos de Crescent de John Coltrane, j’écoute Crescent. Je l’écoute avec plaisir. Grand plaisir. Longues introductions, lentes, calmes au saxo, notes étirées, quelques grappes de notes de piano de-ci de-là, la batterie qui ignore les fûts pour se concentrer sur les cymbales, la basse discrète. L’ambiance qui change petit à petit, s’envenime, le rythme qui s’accélère, la rage qui gagne et, à la fin, Coltrane qui tord son thème en tous sens, semble tordre son instrument lui-même, l’emmener où nul autre que lui ne s’autoriserait à emmener un saxophone. Pourquoi encore essayer de décrire de la musique ? j’en suis incapable. J’aime Crescent. Beaucoup.
Ce n’était pas gagné. Crescent, je l’avais vu, un autocollant Coup de Coeur en évidence sur le cellophane, dans les rayonnages chez Gibert, Versailles, un vendredi soir, le soir où j’ai acheté Get Happy !!… mais j’ai eu peur… j’ai peur désormais à chaque fois que je dois veux envisage d’acheter un nouvel album de Coltrane. La faute à Ascension. Encore traumatisé par cet album, Ascension, que je ne comprends pas. Absolument pas. Peur que Crescent soit dans la veine d’Ascension. Je ne l’ai pas acheté ce jour là, pas ce vendredi soir, Crescent.
Je l’ai acheté le lendemain, chez Gibert, boulevard Saint Michel, quelques heures après une chute mémorable dans les escaliers qui remonte de la station Cluny La Sorbonne au cours de laquelle j’ai héroïquement sauvé l’appareil photo de Natacha d’un choc qui aurait pu être désastreux, mon genou gauche a un peu morflé. Ce samedi où j’ai acheté mon pirate de Joy Division, celui où j’ai enseigné l’origine d’Oasis à mon neveu. Entre-temps, j’avais vérifié sur Internet, Wikipedia… l’article m’avait rassuré, Crescent était davantage comparé à A Love Supreme qu’à Ascension.
Pourtant quand je l’ai passé la première fois, trois ou quatre ou cinq jours plus tard - délai d’appréhension - j’étais encore anesthésié par le doute. Je l’ai entendu sans l’écouter. Comme lorsqu’on lit un livre en pensant à autre chose et qu’au bout de dix pages, on s’aperçoit qu’on n’a aucune idée de ce que l’auteur dit et raconte. Une première écoute neutre, vide qui n’a servi qu’à lever mes craintes. Qui m’a certainement libéré aussi de mes dernières réticences face aux nouveaux (nouveaux pour moi) Coltrane - je l’espère du moins.
Révélation dès le deuxième passage sur la platine - j’en suis au cinq- ou sixième… Crescent est fabuleux.
PS : Natacha, en connaisseuse, a très apprécié le solo de batterie de The Drum Thing.
Crescent
John Coltrane
Impulse ! 2008
01 - Crescent
02 - Wise One
03 - Bessie’s Blues
04 - Lonnie’s Lament
05 - The Drum Thing
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